Qu'est-ce que l'individuation et pourquoi est-elle importante ?

L'individuation peut se définir comme l'autoréalisation via un processus qui intègre le conscient et l'inconscient. Découvrez en détail en quoi consiste ce processus et comment il se déroule.

Rédigé et vérifié par la psychologue Maria Fatima Seppi Vinuales.

Dernière mise à jour : 02 novembre, 2024

Le sujet de l’individuation a suscité l’intérêt dans différentes disciplines, y compris la psychologie. Et ce, car ce processus se déroule depuis les premières années de la vie jusqu’à ce que la personne atteigne autonomie et indépendance.

Ce concept acquiert des nuances dans divers aspects. L’une des approches les plus importantes a été celle de Jung. L’importance qui lui est attachée est la possibilité pour la personne de se développer, mais en relation avec les autres.

Autrement dit, les personnes déploient leur potentiel et leurs intérêts dans le respect de la société à laquelle ils appartiennent et dans laquelle ils vivent. Voyons de quoi il s’agit.

Qu’est-ce que l’individuation ?

Le créateur de l’idée d’individuation comme aspect clé à développer est Jung. Ce psychologue a basé une grande partie de sa théorie sur le processus d’individuation comme le but que tout être humain cherche à atteindre.

Pour le psychanalyste, il s’agit d’une plus grande prise de conscience de soi. La définition qu’il propose dans son ouvrage Psychological Types est la suivante :

Comment se développe l’individuation ?

L’individuation se fait toujours de manière conflictuelle, puisqu’il s’agit de la recherche d’intégration et d’harmonie entre des tendances opposées. Cela renvoie à la tension générée entre le conscient et l’inconscient, l’individuel et le collectif.

L’union des contraires est ce qui nous permet d’avoir une personnalité unifiée, cohérente et riche.

Bien qu’il existe différentes propositions concernant la façon dont le développement de l’individuation se produit à partir de la théorie de Jung, une synthèse schématique rassemble les étapes mentionnées ci-dessous.

Première étape

Cela commence par la reconnaissance des aspects de nous-mêmes qui sont voilés et qui font partie d’un inconscient qui, jusqu’à présent, était inconnu. La personne reconnaît qu’il y a quelque chose au-delà de la conscience et se met en mouvement pour déterminer de quoi il s’agit et le transcender.

Deuxième étape

Cela a à voir avec l’acceptation des zones d’ombre, c’est-à-dire avec la rencontre et l’acceptation de ces aspects cachés. Bon nombre des éléments qui en font partie ne sont pas socialement acceptés ou valorisés. Cependant, ils doivent être acceptés comme faisant partie de notre nature et nous devons apprendre à vivre avec eux.

On y retrouve l’importance que Jung accordait à l’intégration et à l’harmonie des contraires. Si nous portons cette idée au présent, nous pourrions l’expliquer comme l’acceptation de nos propres limites et des aspects dont nous ne sommes pas si fiers. C’est-à-dire que nous acceptons le fait d’être  imparfaits.

Troisième étape

C’est la rencontre avec des archétypes sexuels, tels que l’anima et l’animus. L’ anima fait référence à l’aspect féminin chez les hommes, tandis que l’animus fait référence à l’aspect masculin chez les femmes.

Quatrième étape

C’est l’étape de l’acceptation de nos limites, c’est-à-dire de nos zones d’ombre. Nous nous visualisons depuis l’humilité et nous nous éloignons de la toute-puissance.

Cinquième étape

La dernière étape concerne l’individuation elle-même, qui s’obtient en intégrant les contraires. En d’autres termes, elle se termine par une psyché harmonieuse. Comme Jung (1939) l’a mentionné dans ses écrits, “la psyché cesse d’être deux moitiés incongrues et devient un tout”.

Tout comme il n’y a pas deux personnes identiques, deux processus d’individuation ne sont pas non plus identiques. Chacun traverse le processus d’une manière unique et singulière.

L’importance de l’individuation dans le développement de la vie

L’individualisation est importante, car elle est orientée vers l’intégration. Si nous essayons d’extrapoler le concept de Jung à un moment plus actuel — et en nous distanciant de la psychanalyse — nous pourrions dire que cela signifie prendre conscience que “nous en faisons partie, mais nous sommes différents”.

Nous nous retrouvons dans des groupes d’appartenance qui nous homogénéisent ; nous faisons partie d’une communauté et d’une famille, avec qui nous partageons des traits communs. En même temps, nous pouvons reconnaître que nous sommes différents, et nous pouvons nous concentrer sur le développement de notre potentiel.

On observe ainsi une tension entre l’individuel et le collectif, entre appartenance et différence.

Il est important de noter que l’absence d’un processus d’individuation a un coût. Pour Jung, ceux qui ne parviennent pas à explorer leur monde intérieur et à s’y connecter pourraient développer différents problèmes au niveau de l’estime de soi, au sein du couple, entre autres.

Comment favoriser le processus d’individuation ?

Divers aspects peuvent accompagner et soutenir le processus d’individuation. Ci-dessous, nous mentionnons quelques-unes des plus pertinents, dans une synthèse qui croise des propositions de lectures issues de la psychologie jungienne, mais aussi des apports plus actuels.

• En acceptant les contraires. C’est une des clés de la psychothérapie analytique. C’est-à-dire reconnaître les tendances et ainsi éviter que les gens ne tombent dans les extrêmes.
• Évitez la dépendance. Sur le chemin de l’individuation, Jung précise que les relations thérapeutiques doivent faciliter l’autonomie. En d’autres termes, il faut empêcher le patient de créer un lien de dépendance envers le thérapeute. Il est essentiel qu’il puisse développer des ressources pour pouvoir se débrouiller seul.
• Promouvoir un environnement d’attachement sécurisé. L’individuation est un processus qui consiste à se détacher de certaines idées de nos parents et de nos pairs. Cependant, pour explorer le monde, il est également nécessaire de s’y sentir en sécurité et en confiance. Ces conditions sont favorisées par des cadres relationnels d’attachement sécure.

Quelles sont les limites du processus ?

Après lecture des propositions de Jung, certaines idées peuvent sembler un peu anciennes, peu accessibles ou compréhensibles pour affronter les vicissitudes du quotidien. Cependant, les contributions de Jung à la théorie du développement de l’autonomie et de la croissance de l’individu ne peuvent être ignorées.

Il s’agit de réinterpréter la théorie pour pouvoir en faire une lecture plus actuelle et pratique. C’est l’une des limites de sa théorie.

L’accent excessif sur l’idée d’atteindre la totalité intégratrice a également été critiqué. Dans de nombreux cas, cette idée pourrait être confondue avec le perfectionnisme.

Or, il s’agit plutôt du contraire : reconnaître qu’il y a en nous des tendances opposées, des zones de lumière et des zones d’ombre opposées. Mais non pas d’un point de vue philosophique ou existentiel ; cette reconnaissance devrait nous permettre d’être plus fonctionnels au quotidien.

La connaissance de soi comme boussole d’individuation

Pour certains, l’interprétation de l’individuation peut être un processus complexe, car elle présente des contradictions entre vouloir appartenir et vouloir en être un.

Cependant, il ne faut pas le penser en termes exclusifs, mais en limites perméables et diffuses, qui peuvent se transformer progressivement en fonction des besoins et des circonstances.

Ce qui est important à maintenir, c’est le respect de soi et de ses propres convictions, au-delà des pressions sociales. Il y a aussi la clé de l’individuation : la connaissance de soi pour la faire jouer en notre faveur.