Kratom : est-il sûr de contrôler les dépendances ?

Le kratom est devenu populaire en tant que complément pour surmonter les dépendances. Cependant, ses effets sont controversés. Découvrez ici pourquoi.
Kratom : est-il sûr de contrôler les dépendances ?
Franciele Rohor de Souza

Relu et approuvé par la pharmacienne Franciele Rohor de Souza.

Dernière mise à jour : 10 août, 2022

Le kratom, dont le nom scientifique est Mitragyna speciosa, est un arbre vivace qui appartient à la même famille que le café. Il pousse dans certaines régions d’Afrique et d’Asie du Sud-Est, mais est commercialisé comme supplément dans de nombreuses autres régions du monde.

En particulier, il est apprécié comme complément pour calmer les symptômes du sevrage médicamenteux, réduire la douleur et supprimer l’appétit. Cependant, l’organisation Food and Drug Administration (FDA) des États-Unis a désapprouvé son utilisation et a émis plusieurs avertissements concernant sa consommation. Que faut-il savoir à ce sujet ?

Qu’est-ce que le kratom et quels sont ses effets ?

Le Kkratom (Mitragyna speciosa) est une plante de la famille des Rubiacées. Il est couramment cultivé en Thaïlande, en Malaisie, en Indonésie et en Papouasie-Nouvelle-Guinée, et est distribué dans le monde entier sous forme de capsules, d’extraits et de poudres.

Ses utilisations en médecine traditionnelle remontent au 19ème siècle, mais elles se sont multipliées ces dernières décennies du fait de la diffusion de ses effets thérapeutiques contre les symptômes de sevrage médicamenteux. Plus précisément, il est devenu populaire en tant que complément pour éloigner les personnes des drogues potentiellement dangereuses, telles que l’héroïne et les opiacés.

On estime qu’il contient plus de 40 composés et 25 alcaloïdes, parmi lesquels se distinguent la mitragynine et la 7-hydroxymitragynine. Ces derniers ont des effets euphorisants et stimulants. On pense même qu’ils ont un potentiel en tant qu’analgésique et anti-inflammatoire.

Comme expliqué dans cette publication de National Institute on Drug Abuse (NIDA), les effets du kratom ressemblent à ceux des opioïdes. Pour être plus précis, leurs principaux composés actifs interagissent avec les récepteurs opioïdes du cerveau et génèrent un effet sédatif et agréable. Ils réduisent également la douleur.

Leur utilisation est actuellement sujette à controverse.

Alors que ses défenseurs s’opposent à son interdiction, des entités telles que la FDA avertissent qu’il existe suffisamment de preuves pour le considérer comme une substance addictive et dangereuse. Et bien que son utilisation ait déjà été interdite dans de nombreux pays, il est encore relativement facile de l’acheter sous forme de supplément dans les herboristeries et sur Internet. Mais quels sont les risques de la consommation de cette plante et de ses dérivés ?

plante de kratom.
Le kratom est de la même famille que le caféier. Il a une action sur les récepteurs opioïdes.



Les risques liés à la consommation de kratom

Pendant de nombreuses années, la prise de suppléments de kratom a été suggérée comme une “option sûre” pour remplacer les opioïdes et autres analgésiques. D’où sa popularité auprès des patients toxicomanes.

Cependant, comme le souligne un article publié sur Substance Abuse and Rehabilitation, la recherche sur ses effets a mis en évidence des problèmes de sécurité qui l’emportent sur les avantages qui lui sont attribués.

Entre 2011 et 2017, les centres antipoison aux États-Unis ont reçu environ 18 000 signalements d’ingestion de cette plante. À partir de là, plusieurs rapports ont été associés à des décès et à d’autres effets négatifs, tels qu’une augmentation de la pression artérielle, des convulsions et des symptômes de sevrage.

Les effets secondaires augmentent avec des doses plus importantes de la plante. Parmi les possibles réactions, figurent les suivantes :

  • Atteinte hépatique
  • Perte de poids
  • Douleurs musculaires
  • Sècheresse buccale
  • Changements dans les habitudes de miction
  • Nausées, vomissements et frissons
  • Troubles du système nerveux, qui se manifestent par des étourdissements, de la somnolence, des hallucinations, une dépression et des convulsions
  • Décès

En plus de ce qui précède, on s’inquiète également des effets négatifs causés par l’interaction avec certains médicaments. Une étude récente publiée sur Journal of Pharmacology and Experimental Therapeutics a déterminé qu’une prise simultanée avec des médicaments peut même entraîner la mort.

En particulier, des interactions médicamenteuses dangereuses ont été identifiées lorsque le kratom est consommé avec des médicaments qui stimulent le système nerveux central, tels que les benzodiazépines, les barbituriques, l’alcool, les opioïdes, les antidépresseurs et les anxiolytiques, entre autres.

Autres préoccupations

  • L’utilisation de kratom est associée à des anomalies du fonctionnement cérébral, en particulier lorsqu’il est pris en conjonction avec certains médicaments. Selon les informations partagées sur Frontiers in Psychology, cela peut entraîner une altération de la mémoire, le coma et la mort.
  • L’utilisation de cette plante en état de grossesse est liée à des effets négatifs sur le développement de l’enfant. Une enquête publiée ans la revue Nature indique que le bébé peut naître avec des symptômes de sevrage.
  • Les suppléments à base de kratom peuvent être contaminés par Salmonella. En 2018, 199 personnes ont été déclarées malades de la salmonellose  dans 41 États.
  • Dans un rapport de cas partagé sur Journal of Investigative Medicine High Impact Case Reports, le kratom a été associé à une augmentation de la prolactine et à un hypogonadisme secondaire. Cela, par conséquent, a conduit à certains troubles, tels que l’aménorrhée, l’infertilité et le manque de libido chez les femmes. Il a également été associé à des problèmes d’impuissance et à un faible désir sexuel chez les hommes.
Patient atteint du syndrome de sevrage du kratom.
Le syndrome de sevrage du kratom peut entraîner des symptômes graves qui affectent le système nerveux central.



Que faut-il retenir sur le kratom ?

Bien qu’en médecine traditionnelle le kratom ait été utilisé contre les addictions, la douleur et la fatigue, il existe actuellement plusieurs mises en garde sur les risques liés à sa consommation. Des études scientifiques suggèrent que ses effets secondaires l’emportent sur les avantages possibles.

Par conséquent, son utilisation et sa distribution en tant que supplément suscitent des inquiétudes. Bien que sa commercialisation ait été interdite dans de nombreux pays, il est encore possible de l’acquérir assez facilement. De plus, il y a ceux qui continuent d’affirmer que sa consommation est sans danger et qu’il représente une option pour surmonter les dépendances.

La vérité est que ce sujet est encore controversé. Pour l’instant, il est préférable d’éviter sa consommation et d’opter pour d’autres stratégies thérapeutiques à l’heure de lutter contre le syndrome de sevrage et les maux. Des alternatives de traitement plus sûres peuvent être évaluées lors d’une consultation médicale.


Toutes les sources citées ont été examinées en profondeur par notre équipe pour garantir leur qualité, leur fiabilité, leur actualité et leur validité. La bibliographie de cet article a été considérée comme fiable et précise sur le plan académique ou scientifique


  • Eastlack SC, Cornett EM, Kaye AD. Kratom-Pharmacology, Clinical Implications, and Outlook: A Comprehensive Review. Pain Ther. 2020;9(1):55-69. doi:10.1007/s40122-020-00151-x
  • Todd, D.A., Kellogg, J.J., Wallace, E.D. et al. Chemical composition and biological effects of kratom (Mitragyna speciosa): In vitro studies with implications for efficacy and drug interactions. Sci Rep 10, 19158 (2020). https://doi.org/10.1038/s41598-020-76119-w
  • Kratom. (April 2019). National Institute on Drug Abuse (NIDA).
    Available in https://nida.nih.gov/sites/default/files/drugfacts-kratom-spanish.pdf
  • Veltri C, Grundmann O. Current perspectives on the impact of Kratom use. Subst Abuse Rehabil. 2019;10:23-31. Published 2019 Jul 1. doi:10.2147/SAR.S164261
  • Swogger MT, Hart E, Erowid F, Erowid E, Trabold N, Yee K, Parkhurst KA, Priddy BM, Walsh Z. Experiences of Kratom Users: A Qualitative Analysis. J Psychoactive Drugs. 2015 Nov-Dec;47(5):360-7. doi: 10.1080/02791072.2015.1096434. Epub 2015 Nov 23. PMID: 26595229.
  • Tanna RS, Tian DD, Cech NB, Oberlies NH, Rettie AE, Thummel KE, Paine MF. Refined Prediction of Pharmacokinetic Kratom-Drug Interactions: Time-Dependent Inhibition Considerations. J Pharmacol Exp Ther. 2021 Jan;376(1):64-73. doi: 10.1124/jpet.120.000270. Epub 2020 Oct 22. PMID: 33093187; PMCID: PMC7745086.
  • Grundmann, O. Veltri, C, A. Salari, M. (March 2019). Sheet for Healthcare Professionals. Available in https://nd.az.gov/sites/default/files/news/Kratom.pdf
  • Fluyau D, Revadigar N. Biochemical Benefits, Diagnosis, and Clinical Risks Evaluation of Kratom. Front Psychiatry. 2017;8:62. Published 2017 Apr 24. doi:10.3389/fpsyt.2017.00062
  • Wright, M.E., Ginsberg, C., Parkison, A.M. et al. Outcomes of mothers and newborns to prenatal exposure to kratom: a systematic review. J Perinatol 41, 1236–1243 (2021). https://doi.org/10.1038/s41372-021-00952-8
  • Multistate Outbreak of Salmonella Infections Linked to Kratom (Final Update). (February 20, 2018). Centers for Disease Control and Prevention. Available in https://www.cdc.gov/salmonella/kratom-02-18/index.html
  • LaBryer L, Sharma R, Chaudhari KS, Talsania M, Scofield RH. Kratom, an Emerging Drug of Abuse, Raises Prolactin and Causes Secondary Hypogonadism: Case Report. J Investig Med High Impact Case Rep. 2018;6:2324709618765022. Published 2018 Mar 16. doi:10.1177/2324709618765022
  • Tayabali, Khadija et al. “Kratom: a dangerous player in the opioid crisis.” Journal of community hospital internal medicine perspectives vol. 8,3 107-110. 12 Jun. 2018, doi:10.1080/20009666.2018.1468693

Ce texte est fourni à des fins d'information uniquement et ne remplace pas la consultation d'un professionnel. En cas de doute, consultez votre spécialiste.